jeudi 15 septembre 2011

L'arrivée des Martineau-Saintonge en Mauricie

L'arrivée des Martineau-Saintonge en Mauricie date de 1759, l'année de la prise de Québec par l'armée de Wolfe. Cette année-là, Geneviève Arcand, alors veuve de Simon Martineau-Saintonge, a déménagé sa famille de Deschambault, dans la seigneurie de la Chevrotière, pour aller s'établir à la Rivière-du-Loup (aujourd'hui Louiseville). La seigneurie de la Rivière-du-Loup appartenait alors aux Ursulines de Trois-Rivières. Les familles Saintonge ou St-Onge de la Mauricie descendent des deux garçons de Geneviève Arcand, Simon et Joseph Martineau-Saintonge.

Le moulin de la Chevrotière à Deschambault
 
Geneviève Arcand

Geneviève Arcand a été baptisée le 5 août 1708 à Deschambault. Elle était fille de Simon Arcand et de Marie Isnard. Elle a épousé Simon Martineau-Saintonge, fils de l'ancêtre Mathurin Martineau dit Saintonge, le 25 février 1726 à Deschambault.

Geneviève et Simon ont eu onze enfants, tous nés à Deschambault, dont les huit premiers étaient des filles. C'est une suite d'événements hautement improbable. Essayez d'obtenir huit faces de suite en lançant une pièce de monnaie et vous risquez d'y passer des jours sinon des semaines. Enfin, les neuvième et dixième ont été des garçons, Simon né en 1741 et Joseph né en 1743, suivis d'une dernière fille prénommée Élisabeth.

Simon Martineau-Saintonge est décédé en janvier 1750. En août de l'année suivante, Geneviève Arcand s'est remariée avec un veuf, Jean Denevers dit Boisvert, qui est décédé lui aussi peu après.

Le contrat

On trouve des informations sur le départ de cette famille pour Louiseville dans un contrat qui a été rédigé par le curé de Deschambault, Jean Ménage, le 27 février 1759. Je suppose que le curé faisait alors office de notaire parce qu'il était instruit et qu'il n'y avait pas de notaire à Deschambault. Le contrat rédigé par le curé a ensuite été collationné par le notaire Guyard de Fleury le 8 octobre 1760. J'ai retrouvé des extraits de ce contrat dans le texte d'une conférence prononcée par le généalogiste Jean-Jacques Saintonge il y a une dizaine d'années.

Le contrat prévoit que Geneviève Arcand échange ses propriétés situées dans la seigneurie de la Chevrotière (maison, terre et bâtiments) contre celles de Jean-Baptiste Maranda situées dans la seigneurie de la Rivière-du-Loup  Il prévoit aussi des échanges d'animaux (vaches, moutons, cochons) et de mobilier (couchettes, rouets) pour éviter d'avoir à transporter le tout. En 1759, par le Chemin du roy, il fallait bien deux jours pour aller de Deschambault jusqu'à la Rivière-du-Loup.

Il est à noter que Simon Arcand, le frère de Geneviève est subrogé tuteur. Les femmes, mêmes veuves, n'avaient pas la capacité légale de contracter. Par ailleurs, le contrat nous apprend que la propriété acquise par Geneviève Arcand à la Rivière-du-Loup était située entre celle de Louis Derive au "sorouest" et celle de Gervais Lambert au "nordest". Le déménagement a dû se faire en cette même année 1759 puisque la famille était déjà établie à Louiseville en 1760.

Le contexte de la transaction

Cette transaction m'a longtemps intrigué. Elle soulève deux questions. Comment une veuve en charge d'une famille nombreuse a-t-elle pu organiser un tel échange entre deux propriétés aussi distantes ? Pourquoi s'est-elle ainsi éloignée de sa famille, de ses frères et soeurs qui vivaient à Deschambault ?

J'ai trouvé quelques éléments de réponse qui peuvent nous aider à comprendre le contexte dans lequel s'est faite cette transaction :
    1. Une des filles de Geneviève Arcand, Marie-Louise née en 1739 était déjà installée dans la région. Elle a épousé Alexis Gerbeau le 7 novembre 1757 à Louiseville. Alexis Gerbeau, natif de Louiseville, est peut-être celui qui a organisé l'échange des terres en 1759 pour permettre à sa belle-famille de venir les rejoindre.
    2. L'autre partie au contrat, Jean-Baptiste Maranda n'était pas un inconnu. Son épouse, Marie-Anne Cloutier, était originaire de Deschambault. Ils se sont mariés dans cette paroisse le 24 octobre 1757. 
    3. On observe à cette époque un mouvement de population de la région de Québec vers les seigneuries situées à l'ouest de Trois-Rivières où des terres étaient disponibles. Un nombre important de réfugiés acadiens se sont aussi dirigés vers cette région à la même époque.
Enfin, il ne faut pas oublier le contexte géopolitique. La forteresse de Louisbourg qui gardait l'entrée du golfe du Saint-Laurent est tombée en 1758. En février 1759, l'invasion de la Nouvelle-France était imminente et prévisible. Geneviève Arcand a peut-être voulu mettre ses enfants à l'abri dans la région des Trois-Rivières, moins exposée que celle de Québec à l'attaque des Anglais. Ce n'est qu'une hypothèse, bien sûr.

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